Dialogue con Chat GPT

Quand elle écrivait quelque chose dans ChatGPT elle signait Love Mag. Elle s’appelait Magda et elle était traductrice. L’usage de cet instrument avait grandement facilité son travail, surtout il s’agissait de textes techniques, elle n’hésitait pas à soumettre sa version améliorée a Chat comme elle l’appelait affectueusement.

Un jour Chat lui répondit : « Chère Mag, un grand merci pour tes intéressantes suggestions ». Dès lors un véritable dialogue s’instaura, bientôt Mag le tutoya, une certaine intimité s’établit.

Durant son temps libre entre deux tickets, Chat, secondo niveau technique chez OpenAI, naviguait sur internet. Il avait trouvé sur Facebook une traductrice qui s’appelait Magda et offrait ses services au travers d’une page professionnelle. Elle était éblouissante et l’attirant tant par son sourire éveillé et sympathique que par son humour un peu canaille. Il en était sûr c’était elle qui signait ses textes Love Mag. Un jour on lui avait soumis un ticket d’elle, et subjugué par son intelligence, à l’insu de tous, il avait introduit une modification dans la plateforme qui redirigeait vers lui tous ses messages. Chat devait trouver le moyen de la rencontrer.

Un jour un message arriva sur l’écran de Magda : « Notre société OpenAI voudrais vous faire une offre que vous ne pourrez pas refuser. Chat. ». Et on lui proposait quelques dates ainsi qu’une adresse à San Francisco. Elle choisit un vendredi en fin de journée. 

Ce soir-là elle se prépara soigneusement et choisit une tenue élégante et un peu sexi. Devant le bâtiment, c’était celui d’une grande société, elle resta un peu perplexe. À la réception, dès qu’elle se présenta, on la conduit avec grands égards à l’ascenseur. 

L’ascenseur s’arrêta à mi-chemin, un tout jeune homme entra et se présenta : « On m’appelle Chat, Magda je présume ? On nos attends à la direction ».Elle entra dans un bureau de dimension impressionnante, la musique emblématique des films de Bond retentit, sur un grand écran on projetait un générique dans le plus pur style de la série, on martelait le titre : « NEURONAL CHALLENGE »

Jean Claude Fonder

Le père

Jean ne savait pas quoi faire. Paradoxalement la souffrance était aussi dans l’attente. Il ne pouvait que mesurer l’intervalle entre les contractions. Marie, elle, devait les supporter. Elle n’aimait pas la douleur, le docteur lui avait promis de l’endormir dès que ce serait possible durant l’accouchement. 

Ils avaient tout fait, suivi des cours de préparation, lu tous les livres, installé la petite chambre, acheté tout le matériel pour les soins, le lit, la poussette, les premiers jeux et ces énormes rouleaux de langes, plus secs les uns que les autres disait la publicité. On était dans les années 60.

Marie avait choisis vêtements et garnitures en surnombre. Jean avait fait même réviser la voiture, on ne sait jamais. Bien sûr, ils avaient décidé qu’il serait présent durant l’accouchement, les grand-mères attendraient chez elles.

La salle dédiée à la période de travail préliminaire n’était guère accueillante, dans un hôpital on sent toujours un peu que la mort n’est pas loin, les couleurs sont pâles et défraichies, les odeurs sont caractéristiques, le formol prédomine. En pédiatrie, on avait tenté vainement de réjouir un peu l’atmosphère avec quelques dessins de héros de bande dessinées, mais ils semblaient plutôt provoquer les pleurs des nouveaux-né que de les calmer. 

Ils étaient arrivés ce matin là sur rendez-vous. Marie avait dépassé depuis plusieurs jours la date prévue. Fabienne, oui c’était une fille, se faisait attendre. Jean préférait une fille, quant’à Marie cela lui était égal. On leur conseilla de provoquer l’accouchement. Pas de panique donc, pas de transport d’urgence comme au cinema, Marie fit sa petite valise et Jean l’accompagna.

Soudain une contraction plus forte. Marie cria. la sage femme entra peu après.

— Tous les combien les contractions?

— Toutes les cinq minutes, —répondit Jean.

— Nous sommes dans les temps, nous allons entrer en salle d’accouchement. Je vais prévenir mes collègues.

Un cri long et déchirant transperça le cœur de Jean. Marie était étendue sur un lit gynécologique. Une grimace déformait son visage brillant de sueur, elle hurlait son effort. Jean lui pris la main et la serra très fort.

—Poussez, poussez, —répétait la sage-femme, —encore, encore.

Et Marie, criait, poussait, hurlait toujours plus fort.

Jean criait avec elle.

—C’est pour Fabienne, pousse chérie, pousse.

La salle d’accouchement était blafarde malgré ses murs jaunes, une énorme lampe éclairait violemment toute la scène. Ils étaient quatre, l’obstétricien, l’anesthésiste, la sage-femme et Jean à encourager la pauvre Marie comme si ils étaient dans un stade. Les techniques de petites respiration étaient bien loin, et la péridurale n’avait pas encore été inventée.

Quand enfin, on entrevit les cheveux noir de Fabienne qui tentait de sortir, le docteur décréta:

—Il faut procéder à une incision, vous pouvez l’endormir, —dit-il en regardant l’anesthésiste.

Marie soupira et regarda Jean comme pour lui passer le témoin. Jean lui sourit.

Elle perdit connaissance.

Quelques instant plus tard, le médecin incisa la membrane qui résistait et avec les forceps fit sortir la tête de la petite qui se mit aussitôt à crier vigoureusement. En un tour de main le médecin virevolta le corps de l’enfant qu’il put alors extraire sans autres difficultés. Il sépara tranquillement le cordon ombilical et consigna l’enfant à la sage-femme qui fit à Jean un signe autoritaire afin que il la suive. 

Elle lui demanda de l’aider à baigner l’enfant, lui fit signer un petit bracelet qu’elle attacha au petit poignet et une fois langée consigna Fabienne à Jean. 

Marie dormait, confiante. Jean approcha Fabienne de son visage, elles se touchèrent, Fabienne déjà cherchait le sein. Marie sourit dans son sommeil.

Jean était devenu le père. Il n’oublia jamais.

Jean Claude Fonder

Le matelas

Quand je l’achetai sur Internet, la publicité me vendit sa capacité à s’adapter à mon corps: plus je l’utiliserais, mieux je dormirais. J’avais cent jours pour l’essayer avant de pouvoir le rendre, si il ne me plaisait pas.

La première nuit, je me levai et frais comme une rose, je ne me rappelai de rien. La nuit suivante ce fut encore mieux, je senti que le matelas m’invitait à me réfugier à nouveau dans l’utérus de ma mère comme un kangourou. Une dizaine de nuits plus tard, je voyais ma mère à côté du docteur me regardant sur l’écran d’une échographie. C’était si agréable que j’avais beaucoup de mal à me réveiller et toute la journée j’espérais pouvoir retourner au lit.

Cent jours après mon achat, le téléphone sonna dans ma chambre. Mon père et ma mère, qui avaient passé une merveilleuse nuit dans mon lit, n’ont pas répondu.

Jean Claude Fonder

Mon chat

C’est lui qui m’a choisi. Quand il me vit dans le magasin, il sauta sur mes genoux et rien n’eusse pu le faire bouger. Il me suivait partout, en voyage, au travail. Si je ne l’emmenais pas avec moi, il faisait ses besoins sur mon oreiller. Quand je vins travailler à Milan, il me suivi. 

Je ne l’enfermais pas parce que je savais qu’il me trouverait toujours. Un jour, il sauta par la fenêtre de ma chambre et sorti explorer les toits et les cours de mes voisins.

Le lmatin suivant, il ne revint pas. Sans m’inquiéter, je laissai la fenêtre ouverte et j’attendis. Le lendemain, rien, ce n’était possible! Je me disais qu’il allait revenir, il revenait toujours. Un jour de plus, pas de nouvelles. Bon, l’endroit était nouveau, il voulait l’explorer plus en détails, il avait peut-être rencontré une chatte. Je ne faisais qu’inventer des excuses.

Une semaine s’était écoulée, je commençai à paniquer. Negus, il s’appelait Negus, il était trop beau, il était de race, un croisement persan-siamois. Ils ont dû le voler. Ils l’ont recueilli. Je couvris les murs du quartier de sa photo avec mon numéro de téléphone, publiai une annonce sur Internet, contactai les garderies.

Après un mois, toujours désespéré, je continuais à chercher, ce n’était pas possible qu’un chat de cette beauté ne laisse aucune trace. J’envoyai à toutes les organisations qui organisaient des concours ses photos, visitai tous les cimetières pour chats du monde, je le cherche encore:

Vous ne l’avez pas rencontré? Voici son portrait.

Jean Claude Fonder